Cité de la réussite : tout réinventer

« Comprendre le monde par le dialogue et le débat pour mieux s’y insérer, s’y mouvoir et pour le transformer ».

La Cité de la réussite est, à travers plus de 40 débats, un lieu d’échange, de dialogue entre les générations, dont on ressort forcément différent car stimulé et enrichi par les propos et les expériences partagés avec les plus éminents acteurs de notre société actuelle.


Le thème est ambitieux « tout réinventer », la présentation un peu solennelle, les invités prestigieux (Simone Veil, Axel Khan, Alain Minc, Christian de Boissieu, Louis Gallois, Boris Cyrulnik, René Frydman, Manuel Valls, Carlos Ghosn, Nathalie Kosciusko-Morizet, Jean-Marie Cavada, Jacques Attali…). Bref, le genre d’évènement qui, même s’il est ouvert au public et que les sujets abordés sont vraiment très intéressants, ne me semble pas forcément pour moi.

Et cette année, mon ancien employeur – qui en est l’un des sponsors – m’y a invitée. Pourquoi pas ? L’occasion d’entrer à la Sorbonne, de voir des personnalités qui marquent notre vie économique et politique, de me cultiver un peu aussi. J’ai donc ainsi assisté il y a deux semaines à trois de ces conférences.

 

Tout réinventer : la révolution numérique
– Nathalie KOSCIUSKO-MORIZET, Secrétaire d’Etat chargée de la prospective et du développement de l’économie numérique
– Jean-Bernard LEVY, Président du Directoire de Vivendi


Après une entrée en matière animée par le journaliste Thierry Guerrier, la discussion s’est basée sur deux séries de questions, posées dans un premier temps par des étudiants puis par l’assistance. Il a été question de l’Internet de demain, de la migration des valeurs des équipements vers les contenus, de la crise de la presse et du livre numérique, d’Hadopi… Petit verbatim.

  • L’émergence de la génération Y heurte les habitudes dans le monde de l’entreprise. Dans une société où le pouvoir est lié à la rétention d’information, avec la nouvelle génération, la valeur n’est plus dans la rétention mais dans le partage de l’information.
  • Pourquoi apprendre par cœur puisque tout est disponible en ligne ? La France est très en retard dans le renouvellement des méthodes d’éducation (et le corps enseignant y est pour beaucoup).
  • Tout blogueur ne peut pas être journaliste.
  • On aura gagné quand on n’aura plus besoin d’Hadopi et que de nouveaux modèles nous amèrenont naturellement à l’offre légale (le son est vraiment pourri dans le téléchargement illégal).
  • Il y a une illusion de gratuité sur Internet aujourd’hui. On croit que Google est gratuit, mais on paie en leur donnant accès à toutes nos données privées (même si la publicité ciblée, ça peut être sympa).
  • Les majors doivent comprendre que les gens consomment la musique en flux et non plus en stock.
  • Je suis pour le droit à l’oubli sur Internet. Et pour l’anonymat sur certains espaces et d’autres pas.
  • J’ai eu un iPad entre les mains cet après-midi au ministère. C’est très masculin : il est lourd et ne tient pas dans un sac à main.
  • L’homo numericus en 2020 ? On a toujours besoin de se rencontrer IRL (In Real Life). Ca se finit toujours autour d’un café.


Comment se préparer à l’improbable ?
– Jacques ATTALI, Ecrivain, président de PlaNet Finance
– Thierry DEREZ, Président directeur général de MAAF Assurances
– Maurice LEVY, Président directeur général de Publicis Groupe


Les trois intervenants ont d’abord tenté de répondre à la question posée, puis la discussion a pas mal tourné sur des questions de l’assistance sur le rapport Attali, la crise financière, Solvency II, l’état mental et moral dépressif de la jeunesse européenne… Bref un débat quelque peu décousu, parfois plutôt philosophique et bien sûr pas de réponse à cette question existentielle. Quelques passes d’armes, « dans l’intérêt de la discussion », entre Attali et Derez, qui a fait preuve de beaucoup d’humour et de répartie ainsi que d’excellents effets de manche, passé d’avocat oblige.

  • La science ? La prière ? La magie ? Aujourd’hui, il nous faut un peu des trois. La meilleure préparation, c’est de vivre.
  • Connaître très bien l’histoire, avoir envie de survivre, penser long, être empathique avec ses amis et ses ennemis, avoir de la redondance.
  • La musique est une recette de la prévision car on explore le champ du possible de l’immatériel bien avant le matériel. Ce qu’on voit arriver : faire de la musique pour soi-même ou alors de la musique spectacle. L’individualisme et le spectacle.
  • La liberté individuelle c’est la précarité. Il faut avoir le sentiment qu’on vit dans la précarité, que tout peut être remis en cause et n’a de valeur qu’à l’instant présent.
  • La moitié des propositions du rapport Attali ont été appliquées (la moitié de droite, probablement).
  • Aucune solution n’a vraiment été tirée de la crise financière.
  • Les fonds de pension américains n’ont pas su anticiper le vieillissement de la population et ont joué au casino avec les CDS pour financer les retraites.
  • Face à l’énergie qui se dégage de la jeunesse chinoise ou indienne, il y a un état dépressif permanent de la jeunesse en Europe.
  • L’altruisme (d’abord égoïste) est en train d’apparaître comme moteur d’avenir. L’économie des ONG va redonner sa chance à l’occident. Contrairement à un verre d’eau, si j’ai une idée et que je la donne, je l’ai encore.
  • Nous ne supportons plus rien. Nous n’avons plus aucune patience. Tout. Maintenant.

 

Tout réinventer et ne rien oublier
– Simone VEIL, Membre de l’Académie Française

Le grand amphi de la Sorbonne était plein (3 000 personnes), j’ai même lu sur Twitter qu’il y avait 500 m de queue pour entrer, heureusement comme je sortais de la conférence précédente dans la même salle, j’avais pu rester et être très bien installée, au 5ème ou 6ème rang en plein milieu. Après la diffusion de « C’est beau la vie » de Jean Ferrat, l’invitée d’honneur est entrée, accompagnée par Marie Drucker. C’était le point d’orgue de ces deux jours de débats, mais ça a été finalement la conférence la moins intéressante des trois auxquelles j’ai assisté.

Simone Veil a d’abord été interviewée par Marie Drucker et a commencé par parler du stress de son entrée à l’Académie Française, même si elle n’a pas encore siégé et ne doit pas selon l’étiquette parler lors des premières séances. Elle a parlé de la déportation (elle a fait graver son numéro sur son épée d’académicienne), de la réconciliation avec l’Allemagne, de son entrée en politique comme femme « alibi », de la loi contre l’avortement.

Simone Veil est à mes yeux une très grande dame, et c’est notamment pour l’entendre que je m’étais inscrite à cette manifestation, mais elle a été très décevante lors de la séance de questions réponses avec les étudiants, pas très pertinente par rapport aux questions posées, répondant souvent à côté comme si elle n’avait pas compris la question, avec beaucoup de généralités et banalités, malgré les relances de Marie Drucker quand elle avait vraiment trop été à côté du sujet. Elle n’en a pas moins été très longuement applaudie par l’assistance debout, saluant la salle et prenant la pose en attendant que les applaudissements cessent, un peu comme une actrice savourant son triomphe. Surprenant.

  • Les combats sociaux qu’il faut prendre en compte, ce sont les différences entre les populations. Il faut au moins vivre décemment, pouvoir aller en classe.
  • Je suis très très européenne, mais en même temps il ne faut pas forcer la main, chaque pays a son système et sa culture. Il faut garder ce qui marche.
  • J’ai toujours un regard particulier, et il est lié à mon enfance. J’ai toujours voulu être très libre.
  • On manque de tolérance.
  • Les français ont une chance exceptionnelle.
  • Qu’on ne veuille plus se marier, cela a de gros inconvénients.
  • S’il y a un homme et une femme pour un même emploi, à mêmes compétences, c’est l’homme qui passe. Les femmes n’ont pas le choix. Lorsqu’elles ne sont pas payées au même salaire qu’un homme pour le même poste, que peuvent-elles faire ? Je ne vois pas de solution pour combler les écarts, je suis complètement démunie.
  • Oui, j’en suis sûre, il y aurait moins de guerres si plus de femmes gouvernaient. Les femmes acceptent mieux les compromis. Les hommes, ça leur enlève quelque chose de faire des compromis.
  • Je dis souvent que sous Giscard et Chirac, j’ai été une femme « alibi ». Ca a été très long ensuite pour que d’autres femmes viennent. Et encore il n’y en a pas tellement.
  • La crise grecque, une fois surmontée, permettra de franchir une étape supplémentaire dans la construction européenne.

En conclusion, à quoi êtes vous la plus attachée dans la vie ?

Très long silence.

  • La liberté pour soi, mais aussi pour les autres.
  • La différence qu’il y a entre les hommes et les femmes en France est inadmissible.

1 commentaire pour Cité de la réussite : tout réinventer

Répondre à ApollineR Annuler la réponse

  

  

  

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.