Comme je l’ai dit dans mon premier article sur le taï chi chuan, cette discipline ne s’improvise pas, mais doit s’apprendre et s’exercer. A l’origine un art martial, ce combat contre un adversaire imaginaire doit être lent, souple et fluide. Une fois seulement que la technique est bien assimilée, les bienfaits de l’harmonie et de l’équilibre (le « Tao ») qu’apporte une pratique quotidienne se font sentir. Persévérence, rigueur, assiduité…
Selon James Kou, président de la F.F.T.C.C., l’origine du taï chi chuan remonte à l’antiquité. On trouve au IVè siècle avant J.C. des techniques d’assouplissement s’inspirant de l’imitation de l’ours et de l’oiseau. A la fin du IIè siècle de notre ère, on parle de « jeu des cinq animaux », une imitation de l’ours, du tigre, du daim, du singe et de l’oiseau. L’école Shao-Lin parle, elle, de 5 techniques : le dragon, le tigre, le léopard, le serpent et la grue blanche, termes semblables à ceux utilisés par le taï chi chuan.
Selon d’autres auteurs, l’invention du taï chi chuan date seulement du XIIème ou XIIIème siècle. Zhang Sanfeng, moine taoïste du monastère du Mont Wudang (nord-ouest de la Chine), aurait créé cette technique après avoir observé un combat entre un oiseau et un serpent au cours duquel il aurait constaté la supériorité de la souplesse sur la rigidité‚ l’importance de l’alternance du Yin et du Yang, l’efficacité des mouvements circulaires. Quoi qu’il en soit, le taï chi chuan est une pratique séculaire, influencée par de nombreux courants, qui perdure au travers de multiples écoles aujourd’hui (voir à ce sujet l’article de José Carmona qui donne tous les détails de cette histoire compliquée). La version que je pratique est la méthode Yang, la plus connue et la plus populaire. Elle a été codifiée au XIXème siècle par Yang Luchan sur la base de l’ancien taï chi chuan de l’école Chen, puis perfectionnée par son petit-fils Yang Chenfu au début du XXème siècle. Considéré comme le maître du taï chi chuan moderne, maître Yang voyagea dans toute la Chine pour l’enseigner et former des milliers de disciples dans les années 20 et 30. Il en fit également rédiger les aspects théoriques et pratiques. L’enchaînement se compose de trois parties, que je reprends ici pour mémoire et dans l’espoir de l’assimiler moi-même. Si j’arrivais à réciter cette liste en faisant les exercices, peut-être pourrais-je enfin faire l’enchaînement toute seule, sans copier sur mes voisins ? Dans le cours que je suis à la F.F.T.C.C., décrit dans le livre de James Kou cité en référence, l’enchaînement est décomposé en 85 séquences, comme dans la version de Yang Chenfu de 1931. On le trouve ailleurs constitué de 88, 103 ou 108 mouvements, mais ce sont bien des formes identiques (par exemple « saisir la queue de l’oiseau » est, selon les auteurs, décomposé en 4 mouvements ou compté comme un seul, de même « mouvoir les mains comme les nuages » peut être décomposé en trois, etc.). |
![]() ![]() |
Première partie 1- préparation 2- le commencement 3- saisir la queue de l’oiseau – pen gauche (parer à gauche) – pen droit (parer à droite) – li (tirer en arrière) – chi (pousser en avant) – an (repousser) 4- le simple fouet 5- les mains levées 6- la grue blanche déploie ses ailes 7- brosser le genou gauche et avancer d’un pas 8- jouer du pipa 9- brosser les genoux et avancer d’un pas – brosser le genou gauche – brosser le genou droit – brosser le genou gauche 10- jouer du pipa 11- brosser le genou gauche et avancer d’un pas 12- pas en avant et coup de poing 13- fermeture apparente 14- croiser les mains Deuxième partie |
Troisième partie 47- emporter le tigre dans la montagne – brosser le genou droit et avancer d’un pas – li – chi – an 48- le simple fouet oblique 49- séparer la crinière du cheval 50- saisir la queue de l’oiseau – pen gauche – pen droit – li – chi – an 51- le simple fouet 52- la fille de jade 53- saisir la queue de l’oiseau – pen gauche – pen droit – li – chi – an 54- le simple fouet 55- mouvoir les mains comme les nuages 56- le simple fouet 57- le serpent qui rampe 58- le faisan doré sur une patte (gauche puis droite) 59- reculer en repoussant le singe 60- le vol en diagonale 61- les mains levées 62- la grue blanche déploie ses ailes 63- brosser le genou gauche et avancer d’un pas 64- l’aiguille au fond de la mer 65- comme un éventail 66- le serpent blanc darde sa langue 67- pas en avant et coup de poing 68- avancer d’un pas et saisir la queue de l’oiseau – li – chi – an 69- le simple fouet 70- mouvoir les mains comme les nuages 71- le simple fouet 72- flatter l’encolure du cheval et la main qui transperce 73- tourner et croiser les jambes 74- avancer d’un pas et donner un coup de poing vers le bas 75- avancer d’un pas et saisir la queue de l’oiseau – pen – li – chi – an 76- le simple fouet 77- le serpent qui rampe 78- aller vers les étoiles 79- reculer pour chevaucher le tigre 80- tourner et taper le pied 81- tirer à l’arc sur le tigre 82- pas en avant et coup de poing 83- fermeture apparente 84- croiser les mains 85- phase finale et retour au point de départ |
Sources :
- « taï chi chuan » de James Kou avec la collaboration d’Eric You, Ed. Marabout (livre + DVD)
- Cloud Hands, Taijiquan and Qiqong, le site de Michael P. Garofolo, professeur de taï chi chuan et qigong en Californie
- Les excellentes vidéos de Yang Zhenduo (fils de Yang Chenfu), avec la participation de Yang Jun (petit-fils de Yang Zhenduo, qui a commencé le taï chi chuan a l’âge de 5 ans et joue le rôle de l’élève).
- Bien que les vidéos soient en mandarin et sans sous-titres, les images permettent de bien comprendre les gestes, le maître étant très précis dans sa démonstration (et même si on ne comprend rien à ce qu’il dit – et il est bavard, il y a bien 5 ou 6 heures d’explications et de démonstration, filmées sous des angles différents, pour un enchaînement qui doit se réaliser au maximum en 25 mn -, sa voix suffit à nous convaincre de ce qu’il ne faut pas faire).
- Sur cette courte vidéo trouvée sur youtube, un petit exemple de l’enseignement de ce grand maître, aujourd’hui octogénaire, et de sa voix si douce :
- Bien que les vidéos soient en mandarin et sans sous-titres, les images permettent de bien comprendre les gestes, le maître étant très précis dans sa démonstration (et même si on ne comprend rien à ce qu’il dit – et il est bavard, il y a bien 5 ou 6 heures d’explications et de démonstration, filmées sous des angles différents, pour un enchaînement qui doit se réaliser au maximum en 25 mn -, sa voix suffit à nous convaincre de ce qu’il ne faut pas faire).
- Le site officiel de la famille Yang, sur lequel on trouve toute l’histoire officielle, un programme de séminaires et de cours, des DVD, tee-shirts et autres accessoires qu’on peut acheter via Paypal…
- Visiblement géré par Yang Jun, aujourd’hui installé à Seattle, le site est la vitrine d’une affaire de famille rondement menée par la 6ème génération !
- Découverte pour moi, cet aspect très commercial relativise bien les choses, même s’il n’y a pas cette dérive en France à ma connaissance et si ça ne remet pas en cause mon intérêt pour cette discipline.
- Visiblement géré par Yang Jun, aujourd’hui installé à Seattle, le site est la vitrine d’une affaire de famille rondement menée par la 6ème génération !
|
|
|
Yang Zhenduo | Yang Jun |
Je comprends mieux pourquoi tu n’arrivais pas à tout retenir! Bon courage pour ton apprentissage ApollineR
Commentaire n°1 posté par ApollineR le 14/06/2008 à 20h55
Hé oui, ça fait beaucoup… Par écrit, cela peut sembler insurmontable alors qu’en pratique les enchainements se font naturellement. N’est-ce pas, ma chère Hélène? 😉
Commentaire n°2 posté par Prudence le 14/06/2008 à 21h15
85 postures, c’est du vrai boulot surtout si on doit aussi négocier avec un tigre, une grue, un cheval et un serpent… Je me souviens d’un enchainement en 78 postures qui me fascinait… sauf que les cours furent stoppés en milieu d’année et je n’ai jamais su la fin de l’histoire…
Commentaire n°3 posté par venezia le 15/06/2008 à 16h51
Ouba ! Tu m’étonnes que tu les retiens pas !! Bon cela m’attire quand même un chouïa mais c’est loin, très loin de mes (seulement) 5 tibétains 😉
Commentaire n°4 posté par Raffa le 17/06/2008 à 11h34
Très interessant, je ne me rendais pas compte que c’était aussi compliqué
Commentaire n°5 posté par Michel le 19/06/2008 à 07h54
Bienvenue Michel.
En fait ce n’est pas si compliqué quand même, mais tout est vraiment codifié, chaque position du corps, des mains, des pieds, et il faut pas mal d’entraînement pour tout mémoriser (enfin pour moi…)
Réponse de Hélène H le 21/06/2008 à 08h53